mardi 10 février 2009

Le passage de la tempête.

Calfeutrés chez eux, les habitants de france attendent sans impatience la fin du monde. Téléphone, douche, changer de robe, se maquiller, avaler distraitement une pomme, changer de robe, changer de robe, changer de robe. Ah oui, les clés aussi. Taxi. Me voilà prête pour une autre longue nuit.

Ils arrivent eux aussi. Marchant en meute ou par paires mais solitaires toujours, rutilants comme des soleils noirs et pourtant creux à l'intérieur vont les noctambulistes. La liberté leur est un fardeau qu'il faut porter scintillant comme une armure, pour camoufler la peur ou la tristesse. L'angoisse d'être laissé de côté s'habille de vermeil, de soie et de poudre blanche pour aller danser plus loin encore que les restes de la nuit. Il faut y être ou ne pas être. Alors on se mire dans les regards, on observe, on soupèse. Trop vieux pour être là. Trop laid pour l'écouter. Trop ivre pour le comprendre. Ou trop brillant pour exister. celui là doit être un rêve...

Ainsi comptant chaque heure passée dans les limbes de la vraie vie, les noctambules dominent l'autre face du monde, roi chacun de son propre cosmos. Parfois cependant, s'opère le miracle : le voile se déchire entre deux enfers personnels, et laisse de longs doigts de conscience toucher délicatement l'âme enfin démaquillée de l'autre. Osmose fugitive.

Alors on repart dans le froid, la pluie et les éléments hostiles. Place de l'Alma, on respire une grande fois et on allume un cigarette, les doigts déjà gourds en arrivant à la Seine, les cheveux en bataille comme après une nuit d'amour, le regard aveugle, les yeux mouillés - mais c'est sans importance maintenant qu'il est parti. Taxi.

Rassasiée jusqu'à la prochaine fois de ma dose d'âme humaine - encore plus splendide quand elle est en ruines - je sombre enfin dans l'oubli. Dehors la tempête s'est tue, elle a nettoyé jusqu'à ma présence.

2 commentaires:

  1. Si tout le monde pouvait être aussi inspiré par les nuits au Baron (je me trompe?), on y croiserait plus que des génies! Très beau texte, tant de talents en une seule personne, j'avoue que je suis bluffée là.

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  2. Eh oui, le baron PEUT inspirer des trucs. Comme quoi faut désespérer de rien. On s'y voit cette semaine pour observer de concert le ballet de la faiblesse humaine (et bouger nos fesses un peu)? jeudi if you please... des bises

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